Le salon avicole Dawajine s’est tenu du 25 au 27 novembre 2014 à Casablanca, au Maroc. L’occasion pour la revue noire de rencontrer les fabricants d’aliments locaux, venus en nombre pour présenter leurs produits et leurs offres de services aux éleveurs. À l’heure où les productions animales du pays explosent, les acteurs de la nutrition animale s’affirment comme des partenaires incontournables. Tour d’horizon d’un secteur en constante progression.
« Plus du tiers des protéines animales dans la ration alimentaire moyenne du consommateur marocain est fourni par le secteur avicole. La volaille, c’est la locomotive des filières d’élevage », explique un responsable de la Fisa (Fédération interprofessionnelle du secteur avicole). Le stand de la fédération avicole est un passage obligé pour tous visiteurs du Dawajine. « La production de viande de volaille s’est élevée à 495 000 tonnes de volailles. 4,5 milliards d’œufs de consommation ont été commercialisés », ajoute notre interlocuteur, qui souligne l’écart encore significatif avec les niveaux de consommation européen et américain. « Nous avons consommé 16 kg de viande blanche/habitant/an en 2013, contre à peine 10 kg/hab/an en 2000. Les progrès ont été importants mais c’est encore beaucoup moins qu’en Europe ou aux États-Unis, où la consommation grimpe jusqu’à 50 kg/hab/an. Nous estimons qu’il reste un potentiel énorme au Maroc. »
Une professionnalisation du secteur

Dans ce contexte, rien d’étonnant à voir le secteur de la nutrition animale s’organiser, pour contenter une demande en aliments composés en forte progression. L’Afac, l’association des fabricants d’aliments composés, regroupe l’essentiel des fabricants industriels du pays. « On répertorie une quarantaine d’usines d’aliments au Maroc, ce qui représente une capacité totale de production de 5 millions de tonnes d’aliments/an. La production effective s’élève en 2013 à 2,75 millions de tonnes d’aliments volaille et 1 million de tonnes d’aliments ruminants », explique Ahmed Lamaachi, responsable administratif et financier de l’Afac qui évoque le chiffre de 6,8 millions de tonnes à l’horizon 2020. L’association des fabricants milite pour une professionnalisation du secteur et assure la promotion des aliments composés dans un pays où subsistent bon nombre d’élevages traditionnels, de seulement quelques dizaines de bêtes. Pour rendre plus compétitif le secteur de l’élevage avicole, les fabricants d’aliments se tournent progressivement vers le modèle de l’intégration, qui domine dans les principaux pays producteurs de volailles. « Cette mutation structurelle est une tendance de fond. Les fabricants d’aliments mettent progressivement en place les principes de l’intégration verticale. Toutes les activités de production, d’abattage et de distribution seront à terme réunies sous la bannière des fabricants d’aliments », assure le responsable. La production de poulet sera presque exclusivement assurée par des éleveurs contractuels. L’intégrateur fournira les poussins, l’aliment, les vaccins, mais aussi l’encadrement technique nécessaire au développement de l’élevage industriel. La Holding Zalagh, les groupes Cicalim, Dar El Fellous, Sinev et Oralia comptent parmi les pionniers de l’intégration au Maroc.
Sécurité sanitaire
La nutrition animale industrielle du Maroc met en avant sa capacité à assurer une traçabilité de la production d’aliments. « Assurer la sécurité sanitaire est une priorité pour l’Afac. Depuis 2010, le corpus réglementaire s’est largement renforcé, avec la promulgation de la loi 28-07 relative à la sécurité sanitaire des produits alimentaires », explique Ahmed Lamaachi. Les principes généraux de sécurité des aliments pour animaux y sont consignés. « Chaque usine doit être autorisée ou agréée sur le plan sanitaire avant toute mise en service. Il s’agit de suivre à la lettre les préceptes de la méthode HACCP. » En application de la loi 28-07, les autorités marocaines ont édicté plusieurs décrets qui fixent les mesures permettant de préserver la qualité et de garantir la sécurité sanitaire, la liste des substances indésirables, les modalités d’étiquetage, etc. « Certaines usines sont allées plus loin et sont aujourd’hui certifiées Iso 22 000 » ajoute-t-il. De son côté, l’Afac s’est dotée d’une démarche qualité volontaire, au travers d’un guide des bonnes pratiques. Mais si le secteur de l’alimentation animale se structure, il n’en reste pas moins fragile, en particulier sur la question des approvisionnements en matières premières.
Expertise approvisionnement
Le Maroc produit des céréales, mais en faible quantité compte tenu des besoins de l’élevage. Hormis la farine de poisson (exportée pour les 2/3, principalement pour l’aquaculture), il n’y a quasiment aucune matière première disponible localement pour les fabricants d’aliments. Près de 90 % des matières premières sont importées, principalement des États-Unis et des pays d’Amérique du Sud. Le couple maïs/soja domine largement les formules d’aliments de ces dernières années, alors que les fabricants utilisaient auparavant une large variété de sources protéiques et énergétiques, telles que l’orge, les tourteaux de tournesol, la graine de soja, le son de blé, etc. Avant les années 2000, l’Afac organisait des achats groupés de matières premières, avec des prix intérieurs administrés. « Désormais, les approvisionnements se font de manière totalement libéralisée directement sur les marchés mondiaux des céréales. Les fabricants marocains sont donc particulièrement sensibles à la volatilité de ces marchés », indique Karim Nourreddine, président de l’Afac. Le maïs et les tourteaux de soja représentent tout de même 70 % du coût d’une formule volailles. « La gestion des approvisionnements est un poste clé dans notre industrie. Les matières premières convoitées par les fabricants marocains comptent parmi celles les plus échangées à l’échelle mondiale et donc parmi celles qui sont les plus exposées aux lois de l’offre et de la demande. » Il faut encore compter avec l’impact du fret maritime, qui gonfle parfois sérieusement le prix des matières premières importées. « Le fret entre le Maroc et le Brésil, l’Argentine et les USA a parfois atteint jusqu’à 105 dollars/tonne, alors que le prix moyen se situe autour de 45 dollars/tonne. »
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O. W.