La Commission européenne a adopté, le 16 juillet, sa « feuille de route » 2010-2015 sur les encéphalopathies spongiformes transmissibles (EST). Si celle-ci se veut, avant tout, une invitation à la réflexion, elle n’écarte pas l’idée d’un retour progressif des protéines animales transformées (PAT) dans l’alimentation des monogastriques. Sous réserve d’un feu vert de l’Efsa, qui doit rendre plusieurs avis scientifiques d’ici à la fin 2010.
B.C.
« Les succès remportés par l’Union européenne dans sa lutte contre les encéphalopathies spongiformes transmissibles (EST), telles que l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) chez les bovins, ou la tremblante chez les ovins et caprins, lui permettent d’envisager une modification de sa réglementation. » Ainsi la Commission européenne résume-t-elle la communication au Parlement européen et au Conseil des ministres de l’UE qu’elle a adoptée, le 16 juillet dernier. Ce document, intitulé « Feuille de route n° 2 pour les EST — Document de stratégie 2010-2015 », détermine les domaines dans lesquels des changements pourraient être apportés à la réglementation communautaire sur les EST. Étant entendu que toute modification des règles en vigueur devra « maintenir les normes élevées de l’Union en matière de sécurité alimentaire et de protection de la santé humaine et animale, et être fondée sur de solides données scientifiques ».
Des pistes d’action
Si cette feuille de route est présentée comme « un document de réflexion destiné à susciter le dialogue sur ces questions », elle identifie par avance six domaines dans lesquels les mesures actuelles de lutte contre les EST pourraient à l’avenir être modifiées :
- les matériels à risque spécifiés (MRS), c’est-à-dire les organes pouvant abriter l’agent de l’ESB. La liste des MRS de l’UE pourrait être alignée sur les normes internationales de l’Organisation mondiale pour la santé animale (OIE) ;
- l’interdiction d’utiliser les farines animales dans l’alimentation des animaux. « Un certain niveau de tolérance pourrait être introduit pour les protéines animales transformées (PAT). Les dispositions interdisant de nourrir par exemple les porcs, les volailles ou les poissons (autrement dit des animaux non ruminants) avec certaines PAT pourraient être supprimées, sans que soit levée l’interdiction de réutilisation au sein de l’espèce (ainsi, on pourrait donner les farines de volaille aux porcs et les farines de porc aux volailles, mais pas ces dernières farines aux porcs) ». Cet objectif étant posé, la Commission s’en remet à plusieurs recherches en cours au sein de l’Efsa (Autorité européenne de sécurité des aliments), dont les résultats sont attendus d’ici à la fin de l’année (voir encadré) ;
- la surveillance. Il serait possible d’aboutir à un système de contrôle mieux ciblé en relevant progressivement les limites d’âge en vigueur pour le dépistage des EST, ou en diversifiant les méthodes de test ;
- les mesures d’éradication de la tremblante. Celles-ci pourraient être mises en conformité avec les connaissances scientifiques les plus récentes, ce qui aboutirait, entre autres, à modifier les mesures de lutte contre la tremblante atypique lorsque les données confirment que la souche de la maladie n’est pas contagieuse, ou à continuer d’encourager le recours à la génétique pour combattre la maladie chez les ovins, grâce à des programmes d’élevage ;
- l’abattage des cohortes. « Puisque le nombre de cas positifs d’ESB est devenu nul en 2009, l’abattage systématique des cohortes de bovins pourrait prendre fin et les animaux pourraient être vendus aux consommateurs pour autant qu’avant leur entrée dans la chaîne alimentaire, ils soient soumis à un test de dépistage dont le résultat est négatif » ;
- les tests ante mortem et post mortem. Si des tests ante mortem devenaient disponibles, le dépistage sur les animaux vivants pourrait être envisagé, ce qui pourrait être particulièrement utile pour la certification des troupeaux de petits ruminants.
« Se concentrer sur d’autres menaces »
La première feuille de route sur les EST, adoptée par la Commission en 2005, décrivait une possible modification des mesures de lutte contre les EST à court, moyen et long terme. « La majorité des actions qui y étaient envisagées à court et à moyen terme ont été réalisées et l’évolution positive de l’épidémie d’ESB déjà observée en 2005 s’est poursuivie. L’objectif de la Commission pour les années à venir est de continuer à réexaminer les mesures mises en place, tout en garantissant une sécurité alimentaire maximale. Les modifications de la réglementation sur les EST sont et continueront d’être introduites selon une approche progressive, étayée par les solides données scientifiques fournies par l’Efsa. »
Dans la définition de sa future stratégie sanitaire, la Commission se dit aussi « obligée de ne pas perdre de vue d’autres menaces pour la santé animale ou humaine, telles que les salmonelles ou la résistance microbienne. » Se fondant sur les données scientifiques probantes disponibles, elle considère qu’il convient de mieux définir les priorités d’action en tenant compte des conséquences des diverses maladies sur la santé publique. Elle conclut d’ailleurs sa communication par cette phrase : « Au vu de l’évolution encourageante de la situation de l’ESB, il vaut la peine d’examiner attentivement les possibilités qui nous permettront de nous concentrer sur ces autres menaces. » Si les aspects financiers de la lutte contre les EST sont ainsi soulignés, l’argument joue dans les deux sens. Si tant est qu’elle soit jugée possible sur un plan sanitaire, « la valorisation des PAT pour l’alimentation des animaux devra être mise en balance avec les investissements à prévoir pour se conformer aux exigences en matière de canalisation » séparée des PAT issues des différentes espèces animales, avertit la Commission. Aujourd’hui, les PAT sont utilisées – outre dans le petfood – principalement comme fertilisant ou comme carburant pour la cimenterie...
... Retrouvez l'intégralité de l'article dans la RAA 639 - septembre 2010