Très répandus en Allemagne, les moulins mobiles fabriquant des mélanges à la carte pour les éleveurs tendent à se développer en France. C'est le cas de LSR Farine, entreprise basée à Sainte-Magnance dans l'Yonne et dont nous avons rencontré le gérant, Pierre Laseur, chez un client à Villargois près de Saulieu (Côte d'Or) pour une fabrication d'un mélange de cinq tonnes de plusieurs matières premières aplaties.

L’élevage a toujours été la passion de Pierre Laseur, fondateur et gérant de LSR Farine. Après avoir pratiqué différentes activités liées à l’élevage, Pierre Laseur travaille cinq ans, jusqu’en 2018, pour une entreprise basée près de Dijon et ayant une activité de fabrication d’aliment à la ferme avec un moulin mobile de marque allemande Gmelin.
« J’ai décidé de créer LSR Farine le 1er août 2018 car je connaissais bien la fabrication d’aliment à la ferme via un camion mobile, une activité faisant l’objet d’une demande croissante et variée », nous explique Pierre Laseur, qui opte pour un camion de la marque autrichienne Tropper. « Il n’y a pas de constructeur de ce type de moulins mobiles en France », remarque Pierre Laseur, qui choisit d’investir dans un camion de cette marque pour « sa simplicité d’utilisation, de fonctionnement, d’entretien et de réparation ». LSR Farine fait donc l’acquisition d’un camion mobile d’occasion MMX6216 pour un montant de 85 000 €, auxquels s’ajouteront 80 000 € de frais de reconditionnement trois ans et demi plus tard. « Mes clients sont des éleveurs bovins de tous les départements de Bourgogne », explique Pierre Laseur, dont le camion parcourt 25 à 30 000 km par an (3 000 km économisés en regroupant les clients).
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Broyage, aplatissage et mélange
L’équipement du camion consiste en un moteur auxiliaire et un broyeur à couteaux (10-12 t/h) sur le côté droit, d’un aplatisseur sur le côté gauche, avec à l’arrière une mélangeuse pouvant contenir au maximum six tonnes. À l’arrière du camion se situent le tableau de commande et un bac d’incorporation de minéraux, ainsi que trois bouches : une permettant de vider le contenu de la mélangeuse dans un silo chez le client, une ayant un lien direct avec la mélangeuse, puis celle reliée à l’aplatisseur ou au broyeur. « Tout ce qui rentre est pesé et passe par la mélangeuse, explique Pierre Laseur, ajoutant : le camion est également pourvu d’un dispositif d’incorporation de mélasse et d’un aimant à l’arrivée des matières premières, pour retenir les éventuels corps étrangers. » « Cette machine est simple d’utilisation », affirme Pierre Laseur, qui vérifie l’écartement des rouleaux de l’aplatisseur avant de démarrer un mélange chez son client éleveur Nicolas Josse (voir encadré p.23). Ce matin, l’écartement est réglé à 1, ce qui signifie que les rouleaux de l’aplatisseur sont bien serrés, le triticale du mélange ayant besoin d’être éclaté. Pour une autre matière première plus digeste comme le pois, les rouleaux seront plus écartés.
« Il y a autant de façons de travailler le grain que de clients », explique Pierre Laseur. Certains préfèrent des mélanges broyés, d’autres aplatis comme chez Nicolas Josse. Avant de lancer la fabrication, une prise d’échantillon est effectuée pour vérifier que le mélange est conforme aux attentes du client. « Le grain n’est pas le même d’une année sur l’autre », précise Pierre Laseur, qui ajoute que la récolte de cette année est plus sèche que celle de l’année dernière.
Sur le terrain : Une livraison toutes les trois semaines

Nicolas Josse est éleveur en association avec son frère Philippe sur la commune de Villargois. Son exploitation de 285 ha est dédiée à l’élevage allaitant (120 mères charolaises et 80 limousines) avec deux types de production : des broutards vendus toute l’année jusqu’à fin août et un atelier d’engraissement de vaches toute l’année. « Je fais appel au moulin mobile toutes les trois semaines pour des fabrications allant de 5 à 10 t », explique Nicolas Josse qui travaillait déjà avec Pierre Laseur avant que ce dernier ne crée LSR Farine. Le mélange réalisé le matin de notre reportage se composait de quatre matières premières : 700 kg d’épeautre aplati, 1,3 t de tourteau Sirugue, incorporés directement dans la mélangeuse (tourteau de soja et de tournesol contenant 2 à 3 % d’urée), 2,5 t de triticale aplati et 500 kg d’avoine incorporés directement dans le mélange afin de favoriser le fonctionnement de la panse des bovins. Une cinquième matière première, le maïs grain, sera incorporée au mélange dès que cette dernière sera disponible à la prochaine récolte. « Le mélange fabriqué est distribué au pré aux vaches et aux broutards, dès que l’herbe commence à manquer et en complément de la ration de base des vaches à l’engrais », explique Nicolas Josse qui estime que le moulin mobile représente un gain de temps pour l’éleveur. « Les rations sont faites avec l’aide du technicien de chez Sirugue, en collaboration avec LSR Farine », ajoute l’éleveur qui apprécie ce service utile pour son exploitation.
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Un tableau de bord facile d’utilisation.
Un marché en croissance
Sur 7 à 10 000 t de mélanges produits par an, 75 % sont aplatis et 25 % broyés. « La demande ne cesse de croître depuis la création de mon entreprise », témoigne Pierre Laseur, avec une hausse de la demande qui est passée d’environ 30 % par an il y a quatre ans à 50-70 % par an aujourd’hui. Cette augmentation de la demande résulte à la fois d’une augmentation des volumes des clients existants et de l’apparition de nouveaux clients, comme des éleveurs laitiers qui incorporent des céréales broyées directement dans leur bol d’alimentation. « Les céréales vont être de plus en plus autoconsommées sur les exploitations dans une conjoncture de forte hausse à venir du prix des tourteaux », ajoute Pierre Laseur. Pour répondre à l’augmentation de la demande, ce dernier envisage de louer un deuxième camion avec un chauffeur à l’horizon 2023. « Je suis au plus près des élevages et apprécie travailler en confiance avec mes clients », conclut notre interlocuteur, passionné par son métier.

Philippe Caldier